Romanianstories

Wednesday, September 06, 2006

L’égalité des chances

Au début du mois de mars, le Centre de “Partenariat pour l’Egalité” organisait en collaboration avec la Société d’analyses féministes, AnA, une Conférence nationale sur “l’Egalité des chances entre femmes et hommes”. Une déclaration politique de principe a été adoptée concernant la mise en oeuvre de l’égalité des chances. Voici une excellente occasion pour insister d’une part sur le statut de la femme au sein de la société et de l’autre sur les avantages et désavantages d’être un homme ou une femme. Je passe le micro à madame Cristina Ilinca de la Société d’analyses féministes, AnA, à propos des principaux obstacles auxquels se heurtent à l’heure actuelle les hommes et les femmes de Roumanie:" La situation des femmes est actuellement inquiétante en R., puisqu’elle est redevable aux vieilles mentalités. Des modèles culturels dépassés rendent l’égalité entre hommes et femmes assez difficile à réaliser. Les effets directs de ces mentalités sont à constater sur les plans social, économique et politique. En R. les femmes et les hommes ont libre accès à l’éducation. Mais bien qu’il y ait autant de filles que de garçons qui terminent le lycée, les revenus des hommes et des femmes ne sont pas égaux, les femmes gagant constamment 20 % de moins par rapport aux hommes. C’est qu’il y a des mécanismes qui poussent les femmes vers des positions moins importantes dans la hiérarchie sociale et dans celle des revenus. Si un certain secteur est profitable du point de vue financier, dans la pyramide des revenus, les chefs et ceux qui obtiennent les revenus les plus importants sont toujours des hommes. Les hommes sont à retrouver au sommet de la pyramide, les femmes se trouvant à la base."
Selon des données de 1999, la plupart des femmes de Roumanie travaillent dans des secteurs budgétaires leur assurant des revenus inférieurs au salaire moyen. Les statistiques nous apprennent que les femmes sont les plus touchées par la transition et surtout par le chômage. Leur difficulté à se faire embaucher, surtout pour un emploi bien payé se rapporte plutôt à des aspects futiles qu’au manque d’expérience. En plus, les femmes sont surtout embauchées dans l’économie souterraine qui ne donne pas accès à la sécurité sociale.
Par ailleurs, aux termex du “code de la famille”, l’âge minimum permettant à deux partenaires de fonder une famille diffère selon le sexe: 16 ans pour les filles, 18 ans pour les garçons. Or, 18 ans étant l’âge de la majorité en Roumanie, à 16 ans les filles n’ont aucun droit. Cette discrimination entraîne, selon les analystes, une grande différence de statut social au sein du couple: les filles peuvent facilement se retrouver dans la situation d’arrêter leurs études pour faire le ménage. Car, traditionnellement, comme on le sait, ce sont les femmes qui assument toutes les corvées de la maison: courses, cuisine, vaisselle, enfants. Et tout cela s’ajoute aux taches professionnelles. Par contre, les hommes n’ont à leur charge que les travaux d’entretien de la maison. Pourtant, il arrive aux hommes aussi d’être discriminés. Leurs chances de se faire embaucher après l’âge de 35 ans diminuent et, à la différence des femmes, ils ne trouvent pas de place pour faire du baby-sitting, du ménage, du secrétariat ou de l’assistance médicale. Notons aussi qu’ils sont considérés moins capables que les femmes pour élever leurs propres enfants ce qui fait que si divorce il y a , c’est la mère qui obtient d’habitude la garde des petits. Mais, comme nous le dit Cristina Ilinca, les Roumains préfèrent passer sous silence ce type de discrimination:“Les femmes ne sont pas les seules à être touchées par cette inégalité des chances: les hommes aussi en sont victimes, mais de cet aspect est d’habitude ignoré. Car les hommes sont, eux, obligés de respecter certains modèles, qui ne correspondent plus à notre époque: entre autres celui de l’homme sur les épauples duquel repose la responsabilité de la famille, qu’il est le seul à entretenir. Dans les conditions où en R. hommes et femmes travaillent et ont donc tous les deux un revenu, l’homme continue d’être considéré comme le seul obligé d’entretenir sa famille. Cette mentalité est inculquée aux garçons en bas âge et elle se trouve à l’origine de cas dramatiques d’inadaptation. En R. les hommes devenus chômeurs durant cette période de transition ont eu plus de difficultés à s’adapter à cette situation que les femmes, précisément pour avoir été éduqués de manière à se sentir plus responsables. Aussi, ont-ils cessé de se juger utiles au moment où ils se sont trouvés dans l’impossibilité d’apporter un revenu à la maison. Les hommes vivent généralement moins que les femmes et en R. ils vivent encore moins que partout ailleurs. C’est la pression psychologique énorme à laquelle ils sont soumis qui explique cette diminution de l’espérence de vie chez les hommes.”
Ce dernier temps, les représentantes des femmes au sein des syndicats semblent de plus en plus actives. Cela prouve que finalement le féminisme roumain est plus qu’un mouvement défendant les droits d’une catégorie sociale résignée et inerte. Le plus souvent, les programmes des organisations féminines de Roumanie sont élitistes et s’adressent uniquement à celles qui ont la chance de vivre dans un milieu urbain. Et pourtant, la plupart des femmes de Roumanie vivent à la campagne. Leurs chances sont limitées, nous le dit notre invitée Cristina Ilinca:“Ce n’est pas de bon augure de naître femme en R. Les chances des femmes de trouver un emploi son minimes. Si l’on regarde les statistiques concernant les personnes actives et inactives du point de vue professionnel, on constate qu’une grande partie des personnes inactives sont justement ces femmes vivant à la campagne qui font un travail à la maison et autour de la maison, sans avoir de revenu; elles n’ont pas de contribution aux assurances sociales et par conséquent leur protection sociale n’est pas assurée. On ne peut parler d’égalité tant que la base économique minimale n’est pas garantie. La situation est inquiétante: les chances de filles et des femmes de R. d’échapper à ce piège des revenus nuls sont très réduites. Des programmes ont été mis sur pied par différentes associations qui concernent aussi les femmes du milieu rural: il s’agit notamment de programmes de planning familial. L’activité des ONGs est pourtant toujours essentiellement orientée vers le milieu urbain, et ça aussi, c’est un problème.”
La participation inégale des hommes et des femmes à la vie publique et à la prise des décisions ne fait que perpétuer les discriminations en fonction du sexe. Bien que les citoyens roumains aient tous, depuis une soixantaine d’années, des droits politiques égaux, la scène politique roumaine continue d’être dominée par les hommes. C’est le message du président roumain, Ion Iliescu, lu à la conférence par la conseillère Anca Kiser, qui servira de conclusion :“Même à présent, que la Constitution garantit le principe de l’égalité, qu’il y a une loi censée combattre les discriminations, les femmes ont toujours des préjugés à affronter et sons soumises à des traitements discriminatoires, tant de la part des employeyrs que dans différents domaines de la vie politique et sociale. Une telle attitude est inacceptable. Pour bonnes qu’elles soient, les lois ne sauraient être appliquées et n’auront les effets escomptés qu’au moment où un changement majeur des mentalités sera opéré tant au niveau des individus que des institutions et de la société dans son ensemble.”

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